14/11/2006
Pour défendre ses deux mines d’amiante, le Zimbabwe supplie l’Afrique du Sud de renoncer à son projet d’embargo sur les importations de la fibre controversée, le chrysotile. Une délégation de haut rang a été récemment envoyée à Pretoria pour une fois encore relativiser les risques sanitaires liés à l’emploi de l’amiante et surtout pour insister sur les conséquences économiques d’une telle décision. En 2005, les deux mines de Shabanie et Mashaba ont fourni 40 millions de dollars de revenus au gouvernement d’Harare. Une source de devises qui prend une importance considérable dans un pays aux abois, où le parti au pouvoir, le ZANU-PF, a pris le contrôle des mines il y a deux ans en expulsant le propriétaire déchu de sa citoyenneté zimbabwéenne.
Depuis, il est devenu Sud-Africain et raconte à qui veut l’entendre que la manne de la fibre honnie sert aujourd’hui à rembourser un prêt du Fonds monétaire international. Quarante pour cent de l’amiante produit au Zimbabwe est exporté en Afrique du Sud, il sert à fabriquer les toits des baraques où vivent les plus démunis ou encore les pédales d’embrayage et les freins des véhicules industriels. La délégation a invité les Sud-Africains à consulter les rapports médicaux établis depuis 40 ans dans cette région minière, mais ces avocats de la dernière chance ont surtout demandé à leurs interlocuteurs de prendre en considération l’impact économique de cette mesure d’interdiction, une centaine de milliers de personnes vivraient indirectement de l’exploitation minière de l'amiante. Un argument qui en vaut un autre, l’Afrique du Sud s’apprête à adopter l’interdiction à partir de 2007, pas seulement pour des raisons sanitaires mais aussi sous la pression du lobby d’Everite: la compagnie qui produisait autrefois ce minéral est devenu le meilleur supporter de son élimination.
Cette entreprise d’extraction et de préparation de matériaux de construction a vu le jour à l’époque de l’apartheid, les cadres connaissaient déjà parfaitement les dangers de l’amiante que les ouvriers noirs extrayaient dans des mines à ciel ouvert. Des milliers de personnes ont succombé au cancer de la plèvre ou des poumons que provoque le contact avec le minerai. Lorsque son usage a commencé à paraître suspect aux yeux de l’opinion publique, l’entreprise a su innover dans un substitut. Il lui reste maintenant à rentabiliser son investissement en éliminant la concurrence directe du chrysotile du Zimbabwe qui est meilleur marché. Ce pays est le cinquième producteur mondial après la Russie, le Canada, la Chine et le Brésil.
Source : Radio France International
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