Dirigé par le Canada, le lobby de l’amiante est parvenu à bloquer l’inclusion du chrysotile dans la liste des produits chimiques et pesticides dangereux qui doivent faire l’objet d’une information préalable avant leur exportation. Cette procédure est prévue par la Convention de Rotterdam et le chrysotile réunit toutes les conditions requises par la Convention pour être inclus dans la liste. Les produits dangereux couverts par cette Convention ne peuvent être exportés sans que le pays importateur donne son “consentement préalable en connaissance de cause” (PIC – Prior Informed Consent). La Convention est entrée en vigueur en février 2004. Actuellement, la procédure PIC s’applique à 29 pesticides et à neuf produits chimiques industriels dangereux.
L’opposition du Canada a reçu l’appui de plusieurs délégations gouvernementales parmi lesquelles la Fédération de Russie, le Kazakhstan, le Zimbabwe, le Mexique, la Chine et l’Inde.
Une majorité d’Etats a appuyé au contraire l’inclusion du chrysotile dans la liste. Cette position a notamment été exprimée par l’Union Européenne, l’Egypte, la Norvège, l’Argentine, le Chili, la Jamaïque, le Congo et la Tanzanie.
Les gouvernements des Etats-Unis et du Brésil ont adopté une attitude cynique. Ils ont évité de se prononcer sur la question en sachant parfaitement que l’absence de consensus allait bloquer la prise de décision.
L’absence de consensus a donc bloqué la décision, ce qui crée un précédent très négatif pour l’avenir de la Convention de Rotterdam.
La position canadienne démontre l’hypocrisie des partisans de l’usage contrôlé de l’amiante. En effet, l’objet de la Convention de Rotterdam n’est pas l’interdiction de substances mais la mise en place d’une procédure d’information et de consentement préalables aux exportations. Si le lobby pro-amiante croyait sérieusement à la possibilité d’un usage contrôlé, il devrait logiquement soutenir toute mesure d’information préalable permettant de mettre en œuvre des mesures de contrôle. En refusant d’informer les pays destinataires d’une exportation d’amiante, les Etats enrôlés par le lobby de l’amiante sacrifient délibérément la vie de travailleurs à des intérêts commerciaux. Il faut rappeler que l’amiante est la principale cause de décès dus à des malaties professionnelles dans le monde et que l’Organisation Internationale du Travail estime le nombre de décès de travailleurs exposés à l’amiante à environ 100.000 par an. Usage contrôlé ou usage sans contrôle, peu importe pour les marchands d’amiante, ce qui compte, c’est la vente de leur production quel qu’en soit le coût humain. L’Association des Victimes de l’Amiante au Québec a commenté l’attitude du gouvernement canadien en ces termes: "Le Canada se rend ainsi coupable de complicité d'un crime abominable qui consiste à répandre en toute connaissance de cause la maladie, la mort et d'atroces souffrances chez des milliers d'êtres humains qui ne connaissent pas le sort auquel ils s'exposent en manipulant de l'amiante chrysotile sans précaution adéquate".
|