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Une nouvelle affaire concernant la directive sur le temps de travail

La réglementation britannique concernant les congés payés est considérée comme contraire à la directive par l'avocat général.

L'arrêt du 26 juin 2001 confirme les conclusions de l'avocat général et considère que la transposition britannique de la directive sur le temps de travail est contraire au droit communautaire en soumettant le droit à un congé payé à une période de travail ininterrompu de 13 semaines chez le même employeur.

L'avocat général M. Antonio Tizzano avait présenté le 8 février 2001 ses conclusions dans l'affaire BECTU c/ Secretary of State for Trade and Industry (Affaire C-173/99). L'affaire porte sur une question préjudicielle relative à la directive 93/104 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail. Le syndicat britannique des travailleurs de la radio, du spectacle de la cinématographie et du théâtre BECTU conteste la réglementation nationale britannique adoptée pour transposer la directive communautaire sur le temps de travail. La question soumise à la Cour de Justice porte sur les dispositions de cette réglementation qui concernent le congé annuel payé. La réglementation britannique subordonne l'octroi de ce congé au fait d'avoir travaillé auprès d'un même employeur pendant une période de treize semaines ininterrompues.

L'article 7 de la directive communautaire prévoit que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'une durée minimale de quatre semaines (avec une possibilité de dérogation qui autorise de limiter ce congé à trois semaines pendant une période de transition s'étendant jusqu'au 23 novembre 1999) "conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales".

Le gouvernement britannique considère que la condition posée par sa réglementation entre dans le cadre de la flexibilité permise par la directive à travers le renvoi à des règles nationales. Le BECTU, soutenu par la Commission, considère au contraire que les conditions posées par la réglementation britannique pourraient avoir pour conséquence de priver d'effet utile les dispositions de la directive concernant les congés payés pour de nombreux travailleurs qui n'arriveront jamais à remplir la condition d'une période de travail ininterrompue de treize semaines auprès du même employeur. De telles situations ne sont pas raresdans l'industrie du spectacle.

L'avocat général confirme le principe posé par les arrêts du 8 juin 1994 concernant la transposition au Royaume Uni des directives sur les licenciements collectifs et les transferts d'entreprise. Dans ces arrêts, la Cour avait marqué les limites de la liberté de choix d'un Etat membre lorsqu'une directive se réfère à la législation et aux pratiques nationales. Il ne faut pas que celles-ci puissent faire obstacle à la protection garantie de façon inconditionnelle par une directive communautaire.

Dans ses conclusions, l'avocat général indique que le droit aux congés payés est un droit social fondamental reconnu par différents instruments internationaux et communautaires (y compris la récente récente Charte des droits fondamentaux). D'autre part, la directive communautaire sur certains aspects du temps de travail n'envisage aucune dérogation à ce droit pour les travailleurs qui entrent dans son champ d'application. La formulation inconditionnelle de la directive selon laquelle les Etats membres prennent toutes les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé payé annuel limite clairement la portée du renvoi à la législation et aux pratiques nationales. Pour l'avocat général "le renvoi vise à permettre aux États membres de définir un cadre normatif qui régisse les aspects organisationnels et procéduraux de jouissance des congés, tels que la planification des périodes de congé, l'obligation éventuelle du travailleur de notifier au préalable à l'employeur la période de congé qu'il entend prendre, l'imposition d'une période minimale de travail avant de pouvoir bénéficier du congé, les critères pour le calcul proportionnel du droit au congé annuel lorsque la durée de la relation de travail est inférieure à un an, etc. Mais il s'agit précisément de mesures destinées à fixer les «conditions d'obtention et d'octroi» du droit au congé, et comme telles autorisées par la directive. Ce qui en revanche ne nous paraît pas autorisé est que l'intervention des législations et/ou pratiques nationales puisse se dérouler dans une liberté absolue (ou quasiment) et aille jusqu'à exclure dans certains cas la naissance même de ce droit" (point 34 des conclusions).

L'avocat général rejette fermement l'argument du gouvernement britannique qui a repris à son compte l'interprétation très restrictive de ses prédécesseurs conservateurs en ce qui concerne l'article 118A du Traité communautaire (repris sous une forme modifiée dans l'actuel article 137). En effet, le gouvernement de M. Blair entend justifier sa position par la défense des "petites et moyennes entreprises" (ou, plus exactement, des patrons de celles-ci) et par des considérations économiques. L'avocat général rappelle la finalité sociale des directives adoptées sur la base de l'article 118A et il indique explicitement: "en ce qui concerne ensuite l'autre élément mis dans la balance, à savoir celui relatif aux charges excessives qu'un régime plus généreux en matière de droit au congé entraînerait pour les entreprises, nous dirons d'abord de façon générale que la directive visée souligne dans son cinquième considérant «que l'amélioration de la sécurité, de l'hygiène et de la santé des travailleurs au travail représente un objectif qui ne saurait être subordonné à des considérations de caractère purement économique.»

Les critères mis en avant par l'avocat général pour limiter la marge de choix des Etats membres quand une directive sociale se réfère à la législation et aux pratiques nationales devraient permettre de constater d'autres manquements dans la transposition des directives communautaires sur la santé au travail. En particulier, la transposition britannique de la directive sur les travailleuses enceintes subordonne l'octroi d'un congé payé de maternité (Statutory Maternity Pay) au fait d'avoir travaillé pendant 26 semaines ininterrompues pour le même employeur. Les travailleuses qui ne remplissent pas cette condition bénéficient uniquement d'une allocation (Maternity Allowance) dont le montant très faible (52.50 livres hebdomadaires en 1994 lors de la transposition) incite à raccourcir la période de congé de maternité.

Une fois de plus, il apparaît que la possibilité pour les organisations d'intenter des recours joue un rôle décisif dans la bonne application du droit communautaire. Il conviendrait d'élargir cette possibilité au-delà du cadre actuel des recours préjudiciels.

Référence: Affaire C-173/99, BECTU c/ Secretary of State for Trade and Industry

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Dernière mise à jour : 10/11/2008
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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